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Un tour de volant, et le géant d’acier se lançait à leurs trousses
en crachant jet de vapeur sur jet de vapeur.
D’une bourrade, Charlotte propulsa le garçon en avant.
— File, vas-y ! s’écria-t-elle. Droit vers l’est ! Je te rejoindrai
plus tard.
—Mais qu…
Elle le poussa si fort qu’il manqua de trébucher. Emporté par
son élan, il déguerpit sans demander son reste.
Charlotte plongea la main dans la poche de sa jupe, où ses
doigts rencontrèrent le métal glacé d’un objet de petite taille qu’elle
tira des plis de mousseline. Quelques tours de clé, et l’appareil
prenait vie en crachotant des étincelles. Avec un soupir de regret,
elle posa la souris magnétique sur le sol herbu, le museau pointé
droit sur l’assaillant qui approchait. La petite créature détala en
vrombissant, ses roues montées sur ressort épousant sans mal le
terrain accidenté.
La jeune fille déguerpit sans attendre, mais son compagnon
d’infortune n’était pas allé bien loin.
—Allez, du nerf ! jeta-t-elle.
Elle empoigna la main du garçon visiblement dérouté, qu’elle
força à la suivre à toutes jambes dans les profondeurs ténébreuses
du sous-bois où les premiers rayons rougeoyants du soleil
pénétraient à peine.
Hors d’haleine, il pressa les doigts de la jeune fille, qui lui
lança un coup d’œil interrogateur. Il braquait sur elle un regard
d’aigle.
—Comment t’appelles-tu ? fit-il.
Elle lui lâcha le bras et rassembla ses jupes pour franchir d’un
bond une bûche couverte de lichen.
—Charlotte !
—Merci de ne pas m’avoir abandonné là-bas.
Elle lui fit un petit signe de tête et força encore l’allure.
Derrière elle retentit l’explosion tant attendue. Ils n’étaient pas
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